19/07/2010
DEDICACE AU TOUQUET
Bonsoir à tous les visiteurs de mon blog. Un petit rappel : je serais en séance de dédicace à la maison de la presse au Touquet le samedi 24 juillet 2010 de 10h00 à 12h00 et de 16h00 à 18h00 pour mon roman "Les amants du Touquet" publié aux Editions Ravet-Anceau dans la toute nouvelle collection Euphoria Amour en Nord. De très belles histoires d'amour qui se déroulent dans notre région. J'espère que vous y viendrez nombreux !
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17/07/2010
MARCHE DE RUE
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14/07/2010
PLUS FORT LA VIE (nouvelle)
PLUS FORT LA VIE
La voiture longea le pont qui surplombait le canal. A l'intérieur du véhicule, une femme silencieuse, pensive. Une jeune femme au teint pâle, presque translucide, le regard vide comme dénué de vie. Sa seule compagnie n'était que le ronronnement bruyant du chauffage de sa C4 grise. Dehors, c'était presque l'hiver. Il faisait froid et, malgré la nuit qui commençait à jeter son voile opaque, la ville était encore en pleine effervescence. La circulation restait dense mais cela n'eut pas l'air de l'intriguer. Au contraire ! Elle semblait rouler comme ça, au hasard, sans but, sans destination précise. Un crachin commença, d'abord, par voltiger de ci, de là, puis à brouiller le pare-brise pour s'écraser enfin violemment. La pluie tombait comme un rideau de larmes sur la ville de Lille. Le véhicule emprunta soudain une petite route sur la droite et se gara, bientôt, sur un parking désert.
Jeanne esquissa machinalement un sourire. Jeanne, c'était son prénom. La trentaine, de taille moyenne. Elle n'était pas vraiment belle mais possédait ce charme, ce mystère qui semblait attirer les regards et semblait plaire à tant d'hommes. Sa longue crinière cuivrée entourait l'ovale d'un visage aux traits fins. Jeanne était divorcée et maman d'une fillette de 5 ans. Depuis quelques années, elle avait réussi à réaliser le rêve qu'elle caressait depuis toujours : celui de s'occuper d'animaux. Elle dirigeait, à elle seule, une petite pension et accueillait à la moindre occasion, des animaux abandonnés, malades ou blessés. Elle les soignait avec habileté et se chargeait, une fois guéris, de leur trouver un foyer stable et chaleureux. Jeanne n'était pas riche mais avait sa clientèle régulière. Le salaire qu'elle percevait lui permettait de mener une vie raisonnable.
Son visage s'éclaira un instant. Ses yeux verts semblèrent admirer cette pluie qui tombait à n'en plus finir. Elle trouvait cela beau. N'importe qui aurait pu la prendre pour une idiote mais cela n'avait aucune importance. C'était beau, tout simplement ! Son regard se perdit à nouveau dans le vide. Elle grimaça profondemment et ferma, très fort, les paupières. Si fort comme si elle ne voulut plus jamais les ouvrir. En vain ! Un instant, une acalmie s'empara de la pluie. Un inconnu qui passait devant sa voiture la dévisagea, l'espace d'une seconde, l'air interrogateur. Elle le fixa, se pinça les lèvres, haussa les épaules puis éclata soudain en sanglots. Jeanne, contrairement à ce que les gens pourraient penser en la voyant, n'était pas idiote, non. Jeanne était malade, tout simplement. Tout s'effondra autour d'elle, cet après-midi lorsqu'elle sortit de l'hôpital. Elle qui avait mis tant de force et d'espoir pour reconstruire sa vie après une éprouvante déception sentimentale. Elle qui avait, malgré tout, essayé de retrouver un semblant de bonheur pour son enfant, venait de voir, en l'espace d'un instant, sa vie basculer à nouveau. Jeanne était atteinte d'un cancer ! Cette terrible maladie dont tout le monde n'osait à peine prononcer le nom tant elle faisait peur. Cette maladie dont tout le monde pensait que ça n'arrivait qu'aux autres.
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Il y a quelques semaines, elle avait eu un doute. Alors qu'elle prenait une douche, elle remarqua, ce jour là, des traces rougeâtres sur le corps. Tout d'abord, elle pensa que cela n'était que de simples ecchymoses et qu'elles allaient disparaître aussi vite qu'elles étaient apparues. Mais Jeanne ne se cognait pratiquement jamais. De plus, elle n'aurait jamais marqué à ce point. Et puis, il y avait eu ce saignement de nez qui avait suivi un violent mal de tête. Et cette lassitude qui la pourchassait sans cesse avec, parfois, cette impression d'étouffer. Oui, à partir de ce moment là, elle avait douté. Néanmoins, elle avait très vite rejeté cette idée morbide de son esprit. Jeanne avait préféré incriminer le stress, son échec passé.
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C'était il y a un peu plus de deux ans. Alors qu'elle rentrait chez elle après sa journée de travail, l'homme qu'elle aimait avait quitté le domicile lui laissant une courte lettre "je fais des efforts chaque jour, j'en ai assez de faire semblant, il n'y a pas de place pour vous deux dans ma vie. Je suis encore jeune, j'ai envie de vivre. J'espère que tu me pardonneras un jour. Tom !" A cette époque, elle aurait voulu mourir. Il aurait même pu lui arriver la pire des choses, elle s'en moquait. Aujourd'hui, le destin la rattrapait, frappant à sa porte sous une autre apparence. Il allait lui offrir ce que jadis elle avait désiré. A la seule différence, c'était qu'aujourd'hui elle voulait vivre, plus fort que tout. Tout ce qui l'énervait auparavant, tout ce qu'elle détestait, au moindre détail, l'émerveillait à présent. Quand le médecin lui annonça qu'elle était atteinte de leucémie, ce fut comme si le temps s'arrêtait. Puis, dès que l'horloge reprit son cours normal, plus rien ne lui parut comme avant. Cet après-midi, Jeanne se demanda ce qu'elle avait fait de mal, pourquoi et si elle avait mérité cela. A cet instant, elle se sentit soudain anéantie, vidée, impuissante face à ce mal qui était en train de la dévorer. Ce mal qui, sans le savoir, avait déjà commencé le compte à rebours. Face à sa détresse, le professeur tenta, en vain, de la rassurer.
"- la science a fait d'immenses progrès, vous savez. On ne meurt plus de leucémie comme il y a encore vingt ans. Pris à temps, les chances de guérison sont élevées. Il vous faudra du temps, beaucoup de courage. Surtout ne jamais vous avouer vaincue. Le traitement et votre moral seront les seules armes face à ce combat !"
Et ce soir, Jeanne ne savait pas quoi faire. Elle était désemparée, seule. Personne pour la prendre dans les bras, personne pour l'aider, la réconforter.
* *
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En ce début de matinée, le moral de Jeanne était au plus bas. Il ressemblait à la grisaille du ciel de cette grande ville du Nord. Elle pénétra dans le hall de l'hôpital, laissant les portes automatiques se refermer derrière elle et se dirigea vers l'accueil, son bagage en main.
"- Bonjour, je suis Jeanne Frémont, se présenta la jeune femme. Je suis attendue aujourd'hui.
- Un instant, lui répondit l'hôtesse. Je sors votre dossier. J'aurai besoin de votre carte vitale et vos papiers de mutuelle."
En tapotant sur le clavier de son ordinateur, le nom de Jeanne s'afficha sur l'écran. Le dossier mentionna : "leucémie"! A cet instant, les yeux de la réceptionniste croisèrent ceux de la jeune femme mais voyant l'air embarassée de celle-ci, lui sourit chaleureusement.
"- Votre chambre est prête, madame Frémont. Si vous voulez passer en salle d'attente. Le temps de prévenir l'infirmière de votre arrivée. Elle passera vous chercher pour vous conduire dans votre chambre. Tenez, je vous rends vos papiers."
Jeanne entra dans la salle d'attente. Quelques gens de tout âge patientaient. La jeune femme prit place entre un jeune homme à la mine patibulaire et un vieux couple silencieux. Hier encore, elle confiait à sa soeur qui devrait prendre soin de la pension et de sa fille jusqu'à son éventuel retour :
"- J'ai peur, Mélissa. Peur de ce qu'il va m'arriver. Peur de cette maladie qui me ronge à l'intérieur, peur de perdre le combat. Si je m'en sortais pas, pourrais-tu...
- Non Jeanne, avait coupé sa soeur. Il ne t'arrivera rien, tu m'entends ! Tu vas te battre et gagner. D'accord ? Tu dois gagner. Il le faut, pour Agathe. Elle a besoin de sa mère. Tu dois être forte, Jeanne !
- Je ne sais pas si mes forces m'accompagneront jusqu'au bout. Te rends-tu compte dans quel état je serais ? Je serais méconnaissable."
Jeanne s'était arrêtée de parler, un instant. Elle scruta sa soeur qui se pinçait les lèvres pour éviter de pleurer.
"- Coupe-moi les cheveux, Mélissa, avait-elle continué. Coupe-les moi, je préfère. Plutôt que de les voir tomber. Tu sais que j'ai toujours été fière de ma chevelure. Allez ! Vas-y, coupe-les. Je les rangerai dans une boîte en souvenir."
A cet instant, Mélissa n'avait pu contenir ses larmes qui lui brouillaient la vue. Et c'est alors qu'elle avait serrée, très fort, sa soeur en lui chuchotant à l'oreille :
"- Je serais toujours là, près de toi, Jeanne. Je vais me battre à tes côtés. On va gagner, tu vas voir. On l'aura et on lui brisera les pinces à ce sale crabe. Il ne t'aura pas, je te promets !"
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"- Madame Frémont, je suis Bérénice, l'infirmière qui va s'occuper de vous aujourd'hui. Je vais vous conduire à votre chambre. Ensuite, je vous ferais quelques prélèvements de sang et vous conduirais voir le professeur.
- Je vous suis, répondit Jeanne en se levant."
L'infirmière lui emboîta le pas. Deux lourdes portes métalliques s'ouvrirent et laissèrent entrevoir la cabine d'ascenseur. Commençait, alors, le périple, le long combat dont Jeanne ne savait si elle en sortirait vainqueur ou pas. L'ascenseur avala rapidement les trois premiers étages de ce grand hôpital. Les deux femmes longèrent le long couloir aux murs beige vieilli et au sol gris. Les couloirs étaient presque déserts. Seul un vieillard déambula, traînant derrière lui, tant bien que mal, sa perfusion. Plus loin, une infirmière pénétra dans une chambre en poussant un chariot de soins. Des râles semblaient provenir d'une chambre lointaine. Une drôle d'odeur flotta dans l'air. Une odeur putride, repoussante : l'odeur de la mort ! Jeanne se sentit, soudain, mal. La tête lui tourna. Elle étouffait ; des gouttelettes perlèrent à son front. Tandis que sa vue se troubla, le sol sembla se dérober sous ses pieds.
"- Vite ! Quelqu'un pour m'aider, alerta l'infirmière. Une patiente vient d'avoir un malaise."
Un jeune homme en blouse blanche sortit d'une salle et arriva en courant.
"- Benoît, aidez-moi à la soulever, s'il vous plaît. Sa chambre est juste là. Nous allons l'allonger"
Benoît était le psychologue de l'hôpital. Grand blond aux yeux marrons, il dégageait de sa personne, une chaleur humaine qui savait mettre les gens en confiance. Il apportait aide et soutien aux personnes malades et organisait, deux fois par semaine, une thérapie de groupe. Celle-ci permettait aux patients d'échanger leur cas, leur expérience, leur crainte et leur volonté de s'en sortir.
"-Qui est cette patiente Bérénice ? demanda Benoît
- C'est madame Frémont. Elle est atteinte de leucémie. Elle vient d'arriver afin de débuter une chimio."
Jeanne revint doucement à elle. Les yeux entrouverts, la vue floue, elle essaya de distinguer, tant bien que mal, ces deux visages penchés au dessus d'elle.
"- Que m'est-il arrivé ? demanda-t-elle étourdie. Où suis-je ?
- Vous vous êtes évanouïe au moment même où nous arrivions à votre chambre, répondit l'infirmière."
Jeanne réalisa qu'elle était à l'hôpital. Combien de temps devrait-elle y séjourner ? La jeune femme regarda autour d'elle. La pièce était spacieuse. Deux peintures aux couleurs vives reposaient sur les murs d'un blanc maculé. Une grande fenêtre laissait filtrer la lumière à travers les stores jaunes.
"- Je vous présente Benoît, dit l'infirmière à Jeanne. C'est le psychologue de l'hôpital. Vous pourrez le voir dès que vous le souhaiterez. Reposez-vous un instant, je repasserai un peu plus tard."
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"- Comment vous sentez-vous aujourd'hui ? demanda le professeur à Jeanne. L'infirmière m'a fait part de votre malaise. C'est fréquent dans votre cas. Demain, nous procèderons à une ponction de moëlle. Cet examen est pratiquement indolore. Il se fait sous anesthésie locale. Ensuite, nous pensons débuter la première série de chimiothérapie. Il faut savoir que nous avons, aujourd'hui, les moyens nécessaires pour atténuer les effets secondaires liés à ce lourd traitement. La chimiothérapie aura pour but de détruire les cellules anormales qui se propagent dans votre sang et qui risqueraient d'infiltrer les différents organes. Dans ce dernier cas, ils perturberaient leur bon fonctionnement. Elle sera répétée plusieurs fois. Généralement, elle est effectuée par cycles de plusieurs jours chacun. Avez-vous des questions, madame Frémont ?
- Quels sont les effets secondaires ? Que va-t-il m'arriver exactement ?"
Le professeur la scruta d'un oeil attentif. Il se frotta le menton puis répondit d'un ton très professionnel.
"- Vous savez, chaque organisme réagit différemment. Chez telle personne, la chimiothérapie agira sur la croissance des tissus sains comme la peau ou les muqueuses. Chez d'autres, elle produira une perte de cheveux ou encore des nausées.
- J'ai peur, Professeur. Je ne veux pas mourir. J'ai une enfant à élever et pleins de choses à faire.
- Je comprends très bien. Il vous faut garder le moral, même si cela vous paraît difficile. Toute notre équipe sera là pour vous aider. Si vous avez des inquiétudes à ce sujet, n'hésitez pas à consulter notre psychologue."
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Plus d'un mois s'était écoulé depuis l'entrée de Jeanne à l'hôpital. Le traitement avait débuté par une chimiothérapie orale. Au début, la jeune femme semblait supporter le traitement. Il ne lui produisait aucun effet secondaire mais très vite son état commença à se détériorer. Jeanne avait des saignements de nez à répétition, ainsi que des vomissements. Un matin, elle se réveilla avec de violentes douleurs osseuses. Si violentes qu'elle en hurla. Le deuxième examen montra une évolution rapide de la maladie. Aussi, l'équipe médicale prit la décision immédiate de la placer sous chimiothérapie lourde.
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Aujourd'hui, Jeanne était allongée, comme depuis des semaines, sur son lit. Elle regardait, affaiblie, couler goutte à goutte ce produit censé la sauver. Jeanne était amaigrie. Contrairement aux déclarations du professeur, elle commençait à ressentir les effets secondaires du traitement. Ses cheveux commençaient à tomber. Elle n'osait plus se coiffer, de peur de tout perdre. De plus, elle avait du mal à avaler. Les aliments ne semblaient plus vouloir acheminer leur parcours vers l'estomac. jeanne avait peur mais elle s'accrochait et continuait de croire, malgré tout, qu'elle s'en sortirait. La photo de sa fille reposait sur son chevet. Un jour, elle prit le cliché entre ses mains, affaiblies, le regarda en souriant avec le peu de lueur d'espoir qui lui restait et lui jura de gagner le combat. Mélissa venait lui rendre visite chaque soir pour lui remonter le moral. Une nuit, Jeanne fut réveillée par une soif intense. Elle se leva, tituba, puis se redressa. Elle se dirigea, doucement vers la salle de bains pour se rincer la bouche. Un autre examen était prévu pour le lendemain et les consignes étaient d'être à jeun. En passant devant le miroir, Jeanne remarqua avec stupeur qu'elle n'avait presque plus de cheveux. Paniquée, terrifiée, la jeune femme se mit à courir dans tous les sens. Puis, dans un moment d'hystérie, elle se mit à tout chambouler dans la chambre. Elle renversa tout sur son chemin, hurlant, cognant dans les portes. Une infirmière et le psychologue, qui étaient de garde, arrivèrent aussitôt. Ils la découvrirent dans un état déplorable. En les voyant, elle courut se réfugier dans un coin, s'accroupit et, enfouissant son visage dans le creux de ses maigres mains, se mit à sangloter.
"- Ne m'approchez pas, cria Jeanne d'un ton enroué. Ne me regardez pas non plus. Je suis un monstre ! Je n'ai plus de cheveux. J'ai perdu ma féminité. Je me déteste et je déteste mon corps. Il me fait tellement mal ! Combien de temps encore, oui, combien de temps devrai-je encore supporter cela ? C'est pire qu'avant. Au début de ma maladie, j'étais bien. Fatiguée, certes mais c'était supportable. Aujourd'hui, avec le traitement, on dirait que le cancer gagne du terrain !"
Le psychologue s'approcha de Jeanne. Il s'accroupit et tenta de la rassurer.
"- Non, Jeanne, il ne gagne pas du terrain. Au contraire ! Il réagit au traitement voilà tout. Ce sont, hélàs, les effets secondaires que vous ressentez. Tout rentrera dans l'ordre après, vous verrez. Vos cheveux repousseront. Ils seront plus beaux qu'avant. En attendant, pourquoi ne pas mettre un foulard. Regardez-nous, Jeanne. Il n'y a aucune raison d'avoir honte de votre état."
La jeune femme hésita un long moment puis écarta les doigts qui cachaient son visage. Elle ôta enfin les mains et releva doucement la tête pour fixer le psychologue. Les yeux de Jeanne trahissaient toute cette souffrance qu'elle endurait. Le regard du psychologue se voulut chaleureux, rassurant, confiant. L'espace d'un instant, une certaine émotion traversa leur regard. C'est à ce moment là que Jeanne esquissa un timide sourire et montra, enfin, une lueur d'espoir.
"- J'aimerais vous voir à mes séances de groupe. Cela vous apportera beaucoup. Vous n'êtes pas obligée de parler. Le fait d'écouter les autres personnes dans le même cas que vous, vous aidera à surmonter votre épreuve. Soyez-en sûre !"
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Six mois plus tard, Jeanne allait mieux. Elle retrouva, avec bonheur, sa fille, ses animaux, sa pension. Tout ce qui lui avait manqué et qui lui avait permis de tenir bon. Sa soeur venait l'aider de temps en temps. Jeanne n'était pas guérie mais son état s'était amélioré. Elle avait repris un peu de poids et ses cheveux commençaient à repousser. Elle portait encore un foulard sur la tête mais cela lui seyait à souhait. Les séances qu'elle avait suivi auprès du psychologue lui redonnèrent le courage, la force de se battre. Elle s'était même liée d'amitié avec lui. Quand elle le voyait, elle se sentait en sécurité. Elle savait qu'elle pouvait lui confiait ses craintes. Il avait toujours les mots pour la réconforter, pour lui faire reprendre confiance. La vie repris son cours, avec des bons moments et des moments où la fatigue lui rappela qu'elle n'avait toujours pas gagné le combat. Jeanne se rendait, une fois par mois, à l'hôpital pour subir des examens de contrôle. Les semaines passèrent. L'amitié qui unissait la jeune femme au psychologue se transforma, peu à peu, à un sentiment plus fort. Ils passaient, de plus en plus, de temps ensemble. Jeanne avait l'air heureuse. Elle avait envie de faire des projets mais évitait d'en parler. Il ne fallait pas donner de faux espoirs aux êtres aimés. La jeune femme était confiance, malgré tout. Néanmoins, elle préféra attendre ce jour où le professeur lui annoncerait sa complète guérison.
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Ce matin, Jeanne se sentait fatiguée, plus qu'à l'ordinaire. Etait-ce le fait qu'elle fêta son anniversaire deux jours plus tôt ? Toujours fût-il qu'elle sentait bizarre. La tête lui tournait, sa poitrine lui faisait mal, son coeur martelait ses côtes. La jeune femme essaya, malgré tout, d'effectuer son travail à la pension. De toute façon, dans une heure, il lui faudrait rechercher sa fille à l'école. Elle en profiterait pour passer à la pharmacie. En attendant, elle décida de rentrer prendre un bain pour se détendre. Jeanne ouvrit les robinets de la baignoire. L'eau qui s'en échappa se mélangea aux doux parfums des onguents. Jeanne eut chaud soudain. Elle décida d'ouvrir la vitre pour laisser entrer un peu d'air. Elle eut l'impression de mettre un temps fou pour parcourir l'aller retour entre la baignoire et la fenêtre. Jeanne avait du mal à respirer. Chaque mouvement accentuait, plus encore, la douleur au niveau des côtes. Tandis qu'elle se pencha pour arrêter l'eau, un flot de sang se mit soudain à couler de son nez et se mêler au bain. La jeune femme se releva difficilement, s'essuya, d'un revers de la main, le nez et se dirigea vers le miroir. Là, elle se mit à pleurer. C'est alors qu'elle attrapa son portable et composa un numéro, les mains tremblantes. Trois sonneries se succédèrent à l'autre bout du fil avant qu'une voix ne réponde :
"- Allo !
- C'est Jeanne ! dit-elle en sanglotant. Benoît ! La maladie ! Elle est revenue. J'ai peur !
- T'affoles pas Jeanne, j'arrive !"
Jeanne raccrocha et appela sa soeur pour lui demande de passer prendre Agathe à la sortie d'école. Elle lui raconta tout avant de reposer son portable. Une nouvelle douleur, plus forte encore, lui martela la poitrine tandis qu'elle fut prise d'une violente quinte de toux. Elle tenta de gagner sa chambre pour se reposer en attendant Benoît mais elle vacilla puis tout devint noir.
Jeanne se réveilla le lendemain à l'hôpital, très fatiguée. Cela était dû à l'évolution de la maladie qui était passée de la phase chronique à la phase aigüe. Près d'elle, Mélissa se reposait dans un fauteuil. Cette dernière avait passé la nuit à veiller sur sa soeur. A présent, Mélissa sut que les jours de Jeanne étaient comptés. Seule, une greffe de moelle osseuse pouvait la sauver. Le regard des deux jeunes femmes se croisèrent longuement. Un regard mêlé de peur, d'amour et de dernier espoir. A cet instant, Mélissa réalisa que leurs destins étaient liés. Après tout, Jeanne était son autre. Elles avaient, toutes deux, hérité du même capital génétique. Elle avait de grandes chances d'être la seule à pouvoir la sauver. Sa décision fut prise. Aussi, dans un élan d'amour fraternel, elle prit la main de sa soeur et la serra très fort. Si fort comme si elle refusait de la voir partir.
"- Je t'aime Jeanne, déclara-t-elle, les yeux embués de larmes. Je suis toi, tu es moi. Je veux partager plein de choses encore avec toi. Agathe et toi êtes toute ma vie. Je suis prête à tout pour te sauver. Jeanne, je vais te donner ma moelle."
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Quelques jours plus tard, Jeanne fut placée dans une chambre stérile et regarda la vie couler, goutte-à-goutte, dans ses veines. Mélissa la regarda depuis une vitre. Les larmes aux yeux, elle lui sourit chaleureusement. Deux de ses doits formèrent un "V". Elle lui avait promis qu'elle gagnerait. Tout se passait bien. Jeanne devrait rester encore un moment à l'hôpital pour vérifier que la greffe fonctionne correctement.
Petit à petit, la jeune femme reprit des forces, des couleurs. Grâce à sa soeur, elle pourrait voir Agathe grandir et pourrait enfin réaliser les projets qui lui tenaient tant à coeur.
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Aujourd'hui, Jeanne sortit de l'hôpital. Les médecins jugèrent son état satisfaisant. Il lui faudrait revenir faire des examens mais le plus dur était loin derrière. Elle sortit de sa chambre. Au bout du couloir, un homme sortit d'une salle, en blouse blanche. C'était Benoît. Il s'avança. Une profonde émotion traversa, alors, leur regard. Jeanne lui sourit et tandis que le jeune homme la prit dans les bras pour l'embrasser, elle lui murmura à l'oreille : "la vie commence enfin !"
FIN
18:48 Publié dans Nouvelle | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, amour, combat